Simplifier, synonyme
d'innovation avec
le Groupe Lacroix

Sujets et thèmes abordés : Approvisionnement local + Commercialisation + Développement durable + Économie circulaire + Écoresponsabilité + R&D.

Innove Inc. 25 – Simplifier, pour mieux s’adapter

Commercialisation, Développement durable, Écoconception, Économie circulaire, Innove inc., R&D

  

Note : Connexion Laurentides n’est en aucun cas responsable des affirmations émises par les invité.e.s. Veuillez noter que cet épisode a subi quelques coupures au montage de manière à fournir un résumé captivant.

Simplifier, une stratégie qui rapporte!

L’épisode d’aujourd’hui se veut porteur d’espoir! Nous parlerons… des emballages alimentaires! On sait que ceux-ci contribuent souvent à faire vendre les produits et qu’ils enjolivent aussi les tablettes de nos épiceries. Cependant, ils peuvent aussi être de grands polluants, et leur impact sur notre empreinte environnementale n’est plus à prouver.

 

Il est temps de considérer des alternatives d’emballages plus écologiques et c’est pourquoi nous sommes très heureux de discuter aujourd’hui avec deux acteurs de changements dans le domaine. Pour l’épisode 25 de Innove Inc., Connexion Laurentides s’entretient avec M. Nicolas Bouveret, Responsable des opérations pour les Amériques du Groupe Lacroix et M. Yves Noel, Consultant indépendant en valorisation de déchets industriels et recyclage (Les Investissements Yves Noel Inc.).

 

🎧 Une écoute qui donne envie de faire plus simple, pour faire encore mieux!

Présentation de nos invités

Nicolas Bouveret, Responsable des opérations des Amériques du Groupe Lacroix

M. Nicolas Bouveret travaille sur le développement d’un emballage alimentaire industriel en cellulose et est responsable des opérations des Amériques (Nord et Sud) pour le Groupe Lacroix, qui produit entre autres les emballages pour Fontaine Santé et pour le Groupe Bel (La Vache qui rit), pour ne nommer que ceux-ci. Il s’agit d’une entreprise française établie dans 20 pays, mais M. Bouveret nous parle aujourd’hui de l’usine de Saint-Placide, dans la MRC Deux-Montagnes.

Yves Noel, Consultant indépendant en valorisation de déchets industriels et recyclage

M. Yves Noel, est consultant sénior en valorisation de déchets industriels et service-conseil en recyclage au sein de sa propre entreprise Les Investissements Yves Noel Inc. Il cumule 30 ans d’expérience dans le domaine de la gestion des matières résiduelles et est animé par un désir constant de trouver des alternatives à l’enfouissement des déchets.

Inspirations de nos invités

Nicolas Bouveret, Responsable des opérations des Amériques du Groupe Lacroix

Ce qui m’inspire, c’est cette phrase – peut-être classique – de laisser à nos enfants un héritage le plus sain possible. Puis, je pense qu’on est allé trop loin. Il faut revenir en arrière, dans toutes les sphères de l’économie ou de la vie.”

 

Yves Noel, Consultant indépendant en valorisation de déchets industriels et recyclage

Je pense que ça mériterait d’être écouté pour vraiment prendre conscience de l’importance du plastique dans nos vies. Juste pour se rendre compte de tout le plastique qui nous entoure viendrait déjà nous apporter une première étape.”

 

Extraits de l'épisode Innove Inc. 25 – Simplifier, pour mieux s'adapter

1. Qu’est-ce que l’innovation pour vous?

Nicolas Bouveret : Déjà, c’est de réfléchir pour ne pas réinventer l’eau chaude. Combien de fois on l’a fait? Et puis la deuxième chose, c’est de ne pas avoir peur de se tromper pour avancer.

 

Carmen-G. Sanchez : Très intéressant cette idée de ne pas avoir peur de se tromper. M. Noel?

 

Yves Noel : L’innovation, c’est de pouvoir être attentif et intéressé à se mouiller pour découvrir, créer, inventer. Et comme disait M. Bouveret, se tromper, ce n’est pas grave. La vie est faite de tromperie.

2. Au niveau des emballages, quels sont les différents enjeux qui vous habitent à titre de directeur de production chez Emballages Lacroix?

Nicolas Bouveret : En fait, le groupe fabrique différents types d’emballage en bois, en carton, en plastique et en cellulose. Comme vous le savez, aujourd’hui il y a beaucoup de pression pour supprimer les emballages en plastique à usage unique. Donc, en fait, on est en train de chercher des nouvelles solutions pour remplacer le plastique par d’autres matériaux. L’Europe a beaucoup d’avance là-dessus, mais ça s’en vient rapidement aussi en Nord Amérique, et puis même à Montréal, il y a déjà des annonces qui ont été faites pour supprimer les emballages à usage unique.

3. Quelles sont les alternatives au plastique?

Nicolas Bouveret : Déjà, je vais peut-être reprendre ce qui vous a été dit tantôt ou les emballages plastiques sont polluants, c’est un peu ce que vous avez dit au départ. En fait, je voulais reprendre parce que ce n’est pas tout à fait ça. Un emballage plastique, au niveau d’utilisation, il n’y a généralement pas de problème. C’est au niveau du recyclage ou on a un problème puisque souvent il est mal recyclé, il est mal réutilisé après sa fin de vie. Donc si on corrigeait ce problème-là, on solutionnerait déjà beaucoup de problèmes. C’est sûr que l’emballage plastique dépend de l’énergie fossile, donc c’est ça qu’on voudrait essayer de corriger pour utiliser plus d’énergie renouvelable pour créer l’emballage. 

 

Carmen-G. Sanchez : Je suis curieuse d’entendre d’emblée M. Noel par rapport à cette affirmation, à savoir à quel point les emballages de plastique sont polluants ou non. Qu’est-ce que votre expérience vous dit à ce sujet? 

 

Yves Noel : Évidemment, le plastique à la base, comme il provient d’énergies fossiles — et puis il y a le transport, les GES, la transformation, etc. — mais il fait partie aussi de notre vie, de notre quotidien depuis les années 50 où est-ce que ça a beaucoup évolué. Aujourd’hui, ça devient une problématique alors que l’ensemble de la société voit les problèmes résultant des rivières, qu’on voit flotter, beaucoup de plastique, l’océan, etc. Évidemment, c’est un problème asiatique à 80 % et une problématique de la gestion des déchets des citoyens. Donc si on revient ici au Québec, on peut considérer que moi, depuis près de 30 ans, je travaille avec les rejets de production qui proviennent des manufactures de produits de plastique et il y a énormément de plastique qui est de bonne qualité. D’ailleurs, j’ai déjà visité l’usine de M. Nicolas il y a quelques années et les plastiques qu’ils utilisent sont 100 % recyclables. Maintenant, c’est entre le déchet ou le produit fait à l’usine, et celui qui est rendu sur les tablettes et qui est rendu dans vos tablettes à la maison.

 

De là, qu’est-ce que vous en faites? Qu’est-ce que le citoyen en fait? C’est là où on s’éloigne de la qualité première de la recyclabilité à cause des contaminations et de tout ce qui s’ensuit. Donc plus on est loin de la source, plus on a des problématiques de contamination, ce qui fait qu’on a des pertes qui se rajoutent. Dans la collecte sélective par exemple, on parle entre 13 % et 15 % de rejet total dans l’ensemble des matières qui entrent dans un centre de tri au Québec. Alors de 13 à 15 % sont malheureusement rejetées pour différentes raisons, mais comme ce sont beaucoup de tris mécaniques, ou à la mitaine, il y a énormément de pertes, ou de produits qui ne devraient pas être là. Donc c’est ça, à ce niveau-là, je pense que l’idée d’innover pour les manufacturiers avec des produits biosourcés, ou de nature plus cellulosique, c’est une très belle innovation, mais qui va demander beaucoup de réflexion pour en arriver à faire que le recyclage ou la récupération soit amalgamé avec ces nouveaux produits qui vont rentrer. Ça va prendre une bonne masse pour être capable de justifier la valorisation de l’autre côté pour le détourner de l’enfouissement.

4. Quand vous parlez de masse, est-ce que vous faites référence davantage à ce qu'il y a plusieurs entreprises qui adhèrent à ce nouveau type d'emballage ou si vous référez au niveau de la consommation d'individus de ces produits?

Yves Noel : C’est le volume, le volume utilisé par le consommateur. Pour vous donner un exemple, présentement avec le nouveau programme de responsabilité élargie des producteurs qui s’en vient pour la collecte sélective, on parle beaucoup – même aux États-Unis; c’est très avancé – d’éliminer le numéro 3 (le PVC) et d’éliminer le numéro 6 (le PS) parce que le volume n’est pas assez important, et il vient contaminer les autres à plus gros volume. Il y a déjà aussi la problématique des pellicules plastiques; oxydatif, bio, compostable, etc., donc ce n’est pas clair ça. Est ce que ça se défait au complet quand on retrouve ça dans la chaîne des centres de tri? Ça devient une contamination à l’usine. Donc, c’est comme si Nicolas verrait dans son usine, il granule son plastique et le bois, puis un peu de cellulose se mélange, et bien au bout du compte, son produit est défectueux et il sort. C’est un bon, un beau challenge comme on dit, pour les prochains mois ou prochaines années à venir, mais je pense que c’est un passage obligé.

 

Carmen-G. Sanchez : Puis, justement M. Bouveret, est ce que vous pouvez nous parler un petit peu plus justement de ce projet là que vous avez de faire davantage de produits en cellulose par rapport justement à ce que M. Noel vient de mentionner particulièrement aussi.

 

Nicolas Bouveret : Il y a plusieurs aspects. Donc, en fait, on peut reprendre la démarche qu’on a faite au départ. Donc comment on peut supprimer ou remplacer le plastique? Donc en fait, il y a des essais qui ont été faits avec des plats qui sont issus d’amidon de maïs par exemple, et comme l’a dit plus tôt M. Noel, c’est que ça vient contaminer nos plastiques. Donc en fait, plus on est vierge, meilleure la qualité du plastique est à la fin parce qu’en fait un consommateur, entre un emballage en PLA ou un emballage en plastique, il ne voit pas de différence. Les centres de tri mécanique ou à la main, comme l’a dit M. Noel, ne voit pas la différence non plus. Le seul centre de tri qui peut la voir, c’est par vision infrarouge où là on vient cartographier vraiment la nature de l’emballage. On est capable de le séparer, puis le mettre au bon endroit, sauf qu’il n’y a pas beaucoup de centres de tri qui en sont équipés. Ce qui est dommage d’ailleurs.

Donc, c’est pour ça qu’on s’est tourné et on est revenu sur le plastique, puis après, on a cherché d’autres alternatives. C’est là qu’est venue la cellulose. Pourquoi la cellulose? Parce que nous, aujourd’hui, on utilise la cellulose de bois, donc on utilise 90 % d’un arbre pour faire de la fibre. Vous imaginez des petites fibres courtes de 1 mm ou 1,5 mm de longueur. On vient les mettre dans un bassin, puis je donne souvent l’image de la boîte à œufs, parce que c’est l’emballage de cellulose qui date depuis longtemps, c’est pas nouveau, donc on a un bassin, et on vient mélanger tout ça. La boîte à œufs est faite avec des papiers recyclés qu’on peut trouver, les papiers journaux, etc., et on fait du papier mâché avec de l’eau. Ensuite on le moule, on vient mettre la forme pour faire la fameuse boîte. Donc on fait à peu près la même chose, sauf qu’on veut utiliser des fibres vierges parce qu’on est dans le domaine alimentaire. Le problème de recycler des fibres aujourd’hui dans l’alimentaire, c’est qu’il y a tellement de produits qui sont utilisés dans les cartons, dans les papiers, qu’on vient contaminer nos emballages. Alors là, je peux parler aussi bien des encres, des vernis, que ce soit des produits rigidificateurs des produits qui résistent parce qu’en fait le papier, il absorbe l’eau. Donc en fait, on met des produits pour repousser l’eau – donc ça c’est des produits chimiques qui ne sont pas tous alimentaires – et aussi le gras, donc ce n’est pas parce qu’on est résistant à l’eau qu’on est résistant au gras. Donc il faut ajouter aussi des produits chimiques pour être résistants gras. Puis là, on voit qu’on a souvent des durées de perméabilité très faibles , on parle de quelques jours. Et nous, quand on veut remplacer un emballage plastique, eh bien on parle de plusieurs jours, voire plusieurs mois.

Et c’est là le défi. Qu’est ce qu’on fait pour rester alimentaire et pour ne pas mettre trop de produits chimiques? Parce que si c’est prendre de la cellulose puis bourrer ça de produits chimiques, bien à la fin, on n’a rien gagné. Donc là, c’est pour ça qu’aujourd’hui on mélange de la cellulose avec le plastique. Pourquoi? Parce que le plastique, ça reste un matériel stable, notamment au niveau du développement des bactéries. Quand on parle de cellulose, de papier et de carton, dès qu’on le met en présence d’humidité ou de chaleur, automatiquement on a un développement de bactéries, et c’est surtout ce qu’on ne veut pas pour conserver nos aliments. Aussi, ce qu’on veut, c’est qu’on voudrait sceller nos emballages pour d’une part avoir à l’inviolabilité comme on dit, et pour être certain que personne ne l’a ouvert avant nous, mais aussi pour garder la fraîcheur du produit. Donc c’est pour ça qu’on est revenus un petit peu en arrière et qu’on mélange de la fibre cellulosique avec du plastique, avec un fin film de plastique. Alors c’est ce qui est déjà utilisé. Ce n’est pas nouveau dans les boîtes à lait, dans les boîtes de jus, si vous découpez une de ces boîtes, vous allez voir qu’il y a un petit film de plastique très mince qui permet d’avoir toutes les caractéristiques du plastique au niveau alimentaire et la salubrité des aliments.

 

Carmen-G. Sanchez : Donc, c’est un emballage qui fait déjà partie de notre vie courante?

 

Nicolas Bouveret : Exact. Alors c’est sûr que là on transforme la forme, on va jusque là. Dans les boîtes de jus ou les cartons de lait, en fait c’est du carton plié. Donc, on vient prendre un carton et on vient laminer une feuille de plastique, donc ça reste quelque chose d’assez simple. Par contre, quand on a un emballage en 3D – comme imaginez un contenant de margarine ou de crème glacée – bien là, c’est plus compliqué parce qu’ on a la forme 3D. Parce que, bien sûr, les grandes marques veulent toujours se distinguer; elles veulent être toujours mieux que les autres. Elles veulent toujours avoir aussi du facing, de l’impression, puis elles veulent toujours que le consommateur, quand il consomme, qu’il ait une bonne tenue en main, des emballages. Donc la difficulté, c’est de remettre un liner de plastique dans un emballage en forme 3D, de conserver l’aliment abrité, être capable de sceller, être capable aussi d’utiliser ces emballages dans les grosses chaînes de production à haute productivité. Parce que vous savez, un plastique, ça a une cote bien définie, c’est très facile à automatiser. Quand on parle des cartons, c’est un petit peu plus compliqué, on varie plus facilement l’humidité, etc.

5. Quels sont les avantages pour un emballeur d’utiliser des produits en plastique qui contiennent de la cellulose?

Carmen-G. Sanchez : À ce moment-là, quand vous dites d’intégrer la cellulose à l’intérieur de produits chimiques, de plastique et autre, où est l’intérêt pour un emballeur?

 

Nicolas Bouveret : On ne veut pas de produits chimiques, il n’y en a pas. Donc on prend une fibre vierge — comme j’ai dit, 90 % d’un arbre — on enlève principalement l’écorce et on vient mettre un fin liner de plastique. L’avantage, ou comment dire… Ce qu’on a vu, c’est que la cellulose a une densité qui est au-dessus de l’eau alors que le plastique est en dessous. Qu’est-ce que ça veut dire? Ça veut dire qu’un plastique flotte tandis que la cellulose coule. Donc il y a quand même des moyens aujourd’hui dans les pâtes à papier, qu’on utilise des machines qui sont capables facilement de séparer la cellulose du plastique. Une fois qu’on a reséparés les deux, bien on peut puisque c’est la cellule lourde vierge, donc idéalement c’est réutiliser ces celluloses pour faire de la pâte à papier et puis on utilisait le plastique soit en énergie, soit — si on fait attention — être capable de le granuler, et puis de le réutiliser dans d’autres secteurs industriels non alimentaires.

 

Carmen-G. Sanchez : Je vois M. Noel hocher de la tête. Justement, comment est-ce qu’on peut compléter ou peut-être le vulgariser davantage dans le centre de tri? Parce que je veux dire que je vous écoute parler, puis je me dis : « Mon Dieu, que c’est complexe, toute cette chaîne-là, pour le consommateur, ou même l’entreprise qui voudrait innover dans ses emballages. »

 

Yves Noel : J’ai eu la chance d’aller visiter Fibres Sustana dans la région de Québec, et eux, c’est une entreprise qui récupère justement les contenants de lait et les cartons avec un laminé de plastique. L’objectif que j’avais, c’était de regarder justement les rejets de plastiques, donc tout le laminé qui sortait de là, et de trouver des solutions, des alternatives à l’enfouissement, parce que pour l’instant, ça s’en va à l’enfouissement. Il est clair que la matière plastique qui est récupérée là contenait encore beaucoup de cartons, donc ils n’étaient pas encore à la fine pointe de pouvoir bien séparer le laminé du carton, mais quand même, je pense qu’on a eu dernièrement de nouveaux équipements pour améliorer ceci. L’autre chose, c’est que les plastiques qui sont rejetés, dus au traitement mécanique de la séparation, de l’eau et autres facteurs, étaient mélangés. Dépendamment des types de plastique utilisés par soit, pour ne nommer que Oasis, ou les cartons de lait ou autres, ils ont différents laminés à l’intérieur. Souvent, c’est du polyéthylène, mais il y avait un peu de polypropylène, il y avait des bouchons qui restaient, il y avait de ces choses-là. Alors oui, au niveau énergétique, ce que Nicolas mentionne, c’est une excellente alternative. C’est une bonne idée. Il faut trouver le moyen d’éliminer l’eau, soit par compresseur ou air, ou autre. Moi, le but de l’exercice que je faisais, et que je suis encore en train de faire avec un projet que j’ai à mes côtés, c’est de faire de la pyrolyse avec les déchets plastiques que j’appelle les plastiques orphelins. Les plastiques qui n’ont pas d’alternative à l’enfouissement, je les appelle les plastiques orphelins. On peut les retrouver dans les écocentres, dans les centres de tri ou dans les rejets de production pour traiter la cellulose qui sera récupérée. Si j’ai bien compris Nicolas, 90 % du produit serait de cellulose, alors il y a déjà un gros avantage à ce moment-là. Et puis, le produit demeure frais, le produit demeure de qualité, alors je pense que c’est un pas dans la bonne direction. Et de l’autre côté, au niveau des nouvelles technologies qui se développent, il y aura des solutions, des alternatives, au plastique orphelin. Juste pour dire que d’ici 2030, 30 % des sites d’enfouissement au Québec vont fermer.

 

Alors, il est impératif que présentement, tous mettent la main à la pâte pour vraiment considérer des solutions, des alternatives à l’enfouissement, parce que ça va très vite. Et Dieu sait que du plastique orphelin, quand on regarde des sites d’enfouissement, que ce soit dans des documentaires, que ce soit à la télévision, sur Internet, etc., que voit-on le plus souvent? On voit du plastique qui flotte, qui traîne, qui est amalgamé là. Alors c’est ça, je pense que la cellulose élimine déjà 80 à 90 % de la problématique du plastique donc je pense que c’est un pas dans la bonne direction. Maintenant, il faudra peut-être voir à pouvoir l’intégrer dans les cartons de lait, et dans les autres cartons à caractère laminé avec le plastique, mais j’ai bien confiance.

6. Quel processus a mené à la création d’un nouvel emballage avec de la cellulose? Qu’est-ce qui a inspiré Emballages Lacroix, justement, à entreprendre ce virage vers des emballages un peu plus écoresponsables?

Carmen-G. Sanchez : Vous faites bien de mentionner toute la complexité et la difficulté qu’il y a de répertorier le plastique orphelin. Justement, chez Connexion Laurentides, on a collaboré avec Synergie économique Laurentides pour faire cette cartographie, tenter du moins de faire cette cartographie-là des plastiques orphelins, parce que souvent, ce sont des niches très petites qui sont de petites quantités dans beaucoup, beaucoup de points, et c’est ça qui devient complexe en fait d’en faire la cueillette, de pouvoir le revaloriser, mais aussi d’y trouver des débouchés. Est-ce que vous pourriez nous parler un petit peu plus, M. Bouveret, de tout le processus qui a mené justement à la création de votre nouvel emballage avec la cellulose ? Je pense que justement vous avez travaillé avec un centre de transfert technologique si je ne me trompe pas?

 

Nicolas Bouveret : Oui, au départ. En fait, quand on fait de l’innovation, ou qu’on essaie de faire l’innovation on va dire, la première chose qu’il faut faire, c’est vérifier que ça n’existe pas, parce que souvent, il y a une partie de recherche avant de se lancer tête baissée à chercher des choses. Il y a des choses qui existent déjà. Donc, en fait, on a utilisé le Centre Technique de Trois-Rivières qui avait déjà, je pense que ça faisait une dizaine d’années qu’il y avait acheté, acquis une machine pour faire de la cellulose en fait, pour faire des emballages 3D en cellulose. Donc, en fait, on a utilisé au départ leur machine pour les premiers essais qu’on a faits. Nous les avons utilisés pour partir, pour voir, pour présenter le concept, et puis aujourd’hui, on a nos équipements et on avance.

 

Carmen-G. Sanchez : Qu’est-ce qui a inspiré Emballage Lacroix, justement, à entreprendre ce virage vers des emballages un peu plus écoresponsables?

 

Nicolas Bouveret : On aime ça. C’est un peu quand même dans notre nature du groupe. On fait déjà des emballages en bois et ça fait longtemps. Donc, c’est un retour aux sources, on a commencé comme ça. Les emballages de médicaments dans les années 40, à la fin de la guerre en Europe, étaient mis dans des emballages en bois. Il n’y avait pas de problème et l’emballage était mis dans le compost. Puis, plus on a évolué, plus on s’est dégradé, donc on fait aussi des emballages en carton. En fait, c’est un peu un retour aux sources, à nous. Ce qu’on essaie de faire, c’est donner les nouvelles caractéristiques d’aujourd’hui, comme on a dit, des barrières, des barrières à l’oxygène, des barrières à l’air pour ne pas qu’on vienne assécher les produits. Donc, en fait, on essaie de rendre nos emballages techniques, parce qu’il ne faut pas oublier que la grosse source de contamination, c’est le gaspillage alimentaire.

7. Vous parlez d’un retour aux sources parce que vous revenez vers des emballages avec des fibres plus naturelles, est-ce que pour vous, c’est une forme d’innovation? Comment arrivez-vous à définir l’innovation pour Emballages Lacroix?

Nicolas Bouveret : Aujourd’hui, il n’existe pas, on n’a pas de solutions ou on peut réduire par exemple, on a dit de 80 %, soit de diviser par huit la quantité de plastique qu’on utilise pour les emballages alimentaires. Donc en soi, l’innovation est là. C’est de réduire, d’être moins dépendant des énergies fossiles parce qu’on est quand même rendu là aussi. Donc, c’est réduire cette consommation de pétrole et puis aller vers des sources plus naturelles. Parce qu’on a parlé des arbres, parce qu’on est au Québec, mais on a plusieurs usines aussi dans le monde et probablement que nous utilisons des fibres différentes. Par exemple, en Amérique du Sud, on va plutôt utiliser des fibres de canne à sucre. Au Québec, c’est sûr qu’on a des arbres à profusion, donc il faut aller chercher les bonnes essences pour avoir les bonnes caractéristiques mécaniques. Et puis, dans d’autres pays, ce sera d’autres choses. On parle aussi d’être capable de récupérer, par exemple, les cotons de maïs pour utiliser la fibre du maïs, pour être capable de faire des emballages. Peut-être aussi que l’avenir ou le futur, c’est d’utiliser une quantité de fibres recyclées quand celles-ci seront de meilleure qualité. J’espère qu’un jour on sera capable aussi de faire des emballages alimentaires avec de la fibre recyclée.

 

Carmen-G. Sanchez : C’est une belle vision que vous proposez là, M. Noel. Justement, on en a parlé plus tôt, que vous sentez un certain virage au niveau de l’économie circulaire, au niveau des pratiques. Si je vous retourne la question, innover en matière d’emballage, ça veut dire quoi?

 

Yves Noel : Je pense que ça serait de limiter les types de produits plastiques. Par exemple, d’en avoir moins parce qu’il y a beaucoup de familles de plastiques. Comme m. Bouveret l’expliquait, la congélation, le froid, la température de la pièce, etc., les gens ne connaissent pas ça. Le plastique, c’est une chimie. Alors si on avait — et l’exemple d’éliminer le PS, le #6 et le #3 dans la collecte sélective — donc moins de produits fabriqués à partir de ça pour le consommateur, je pense qu’on est déjà un pas en avant parce qu’il va y avoir moins de contaminations, moins de plastiques orphelins. Ceci dit, vas avertir ton client chinois qui vend des pinces à grande quantité, que tu achètes et que tu arrives chez vous, tu essaies d’enlever tes pinces de son emballage, puis tu te coupes quasiment le doigt à cause du plastique, et bien c’est du PVC, c’est bleuté un peu. Donc, il va falloir que ça aille jusqu’à celui qui décide, celui qui achète le produit, ou celui qui donne le devis, qui doit dire qu’il faut que ça soit un emballage de telle sorte. Alors ça va loin, et est-ce que les manufacturiers sont prêts à se rendre là?

C’est beaucoup d’investissement. M. Bouveret l’explique, depuis les années 40, ils ont fait énormément d’investissements pour développer de nouvelles choses. Le citoyen était habitué à fonctionner en consommant ; à prendre, puis à jeter. Et là, on est du côté où ce qu’au niveau de l’innovation, on doit être intelligent avec ce qu’on fait avec les matières. Donc, il y a au côté chimique, un côté d’inversion pour les plastiques où ce que la pyrolyse, par exemple, c’est de prendre des plastiques orphelins — divers types de plastiques — afin de les mettre dans un réservoir, puis de fermer ça sous vide et de monter la chaleur à 300 degrés afin de transformer ça en vapeur. Les vapeurs sont ensuite aspirées, et ça devient des huiles pyrolytiques, comme du diesel pour les bateaux et pour différentes utilisations commerciales. Cette innovation-là, qui n’est pas tant une innovation parce que la pyrolyse date d’il y a longtemps, mais de l’appliquer dans le plastique fait qu’il y aura moins plastique, va s’en aller à l’enfouissement. Il faut y aller petit pas par petit pas, et ce n’est pas la solution idéale, mais le temps que ça va arriver au Québec — j’espère d’ici deux ou trois ans — à ce moment-là, ça va déjà être une solution qui va beaucoup aider. En contrepartie, des entreprises comme Lacroix vont développer encore plus leur cellulose. Sachez que quand vous achetez votre sac de patates, à l’intérieur il y a comme une cire, ou une couche plastifiante, qu’on appelle un wet string, et qui repousse l’eau le plus possible. Il y a dix ans, les papetières ne pouvaient pas accepter ce type de produit là pour le recycler, le mettre dans leur pâte à papier. Aujourd’hui, c’est possible. Il y a donc des petites avancées, tranquillement, pas vite, qui font qu’on évolue et que ça avance. Maintenant, c’est qu’il faut y aller petit pas, par petit pas. Si on parle des centres de tri, bien avec la nouvelle responsabilité élargie des producteurs, eux ils vont avoir à débourser un montant d’argent qui va justifier l’opération des centres de tri, alors ce sont eux qui vont devenir responsables. Probablement que ça va les amener encore plus loin dans leur démarche, parce que là, ils vont être responsables, puis ils vont payer. Ils vont probablement faire payer le consommateur… Je ne le dis pas, je l’entends, mais ceci dit, c’est une espèce de mélange d’essais, d’erreurs, d’innovation et d’amélioration. Puis, de rester focus sur nous, sur notre économie circulaire locale, sur notre développement local. Parce que d’acheter de l’extérieur, c’est une chose, mais on ne connaît pas la qualité des matières premières qui arrivent ici.

Moi, c’est tellement drôle, je vous fais un petit aparté. Au Super Bowl, on se retrouve avec des amis et on apporte chacun notre nourriture. J’enlève le couvercle des crudités, et sur le dessus il est écrit PET #1. Alors, je regarde le nom de la compagnie, et c’est drôle parce que moi, je récupère du PET dans des usines manufacturières ici au Québec et j’envoie ça à cette usine là. Et là, je suis chez des amis, j’ouvre le produit, je regarde, et je vois le nom, alors je dis : « Ah ben, il y a un peu de mon plastique et de mon économie circulaire là-dedans. » C’est comme spécial de voir que ce qu’on fait, ça revient. Donc aujourd’hui, quand vous achetez une pelle, quand vous achetez un grattoir, sachez que certains grattoirs pour les automobiles contiennent des Lego. Alors quand on commence à comprendre toute cette mécanique-là — et il y a aussi peut être des pots de M. Bouveret dans des pelles, des produits en polypropylène, il y en a plusieurs, alors on en retrouve — alors quand on prend conscience de ça, peut-être que pour les citoyens, ça nous amène à être plus conscients. C’est la conscience et l’éveil qui vont nous amener plus loin.

8 . Quelles sont les tendances qui vous animent chez Emballages Lacroix en matière de nouveaux types d'emballage? Comment la clientèle réagit-elle à l'évolution des emballages? Est-elle réceptive à l’évolution de l'industrie?

Nicolas Bouveret : Comme M. Noel l’a dit, en fait la pyrolyse est utilisée dans quelques usines en Europe qui ont démarré ces procédés-là. Donc comme il a dit, on est capables de refaire des huiles, puis avec ces huiles, nous sommes capables de refaire le monomère pour être capable de refaire du polypropylène par exemple. L’avantage de ce procédé, c’est qu’on peut en faire des emballages alimentaires parce qu’on repart vraiment du monomère pour être capable de. Le problème, c’est qu’aujourd’hui les capacités sont très, très, très limitées. On parle aujourd’hui de quelques tonnes disponibles sur 2022, on en a peut-être 50 – 100 tonnes pour 2023, et peut-être on nous en promet pour 2024, mais c’est très difficile d’avoir accès à ces matériaux. En fait, c’est du polypropylène fait à partir de déchets. Donc on chauffe, comme l’a dit M. Noel, on récupère l’huile, et après on est capable de raffiner l’huile pour être capable de refaire un monomère. Donc ça, c’est bon parce que ça tourne. Ça tourne, et on ne dépend plus de l’énergie fossile, on recycle. Donc ça, c’est bien.

Après, oui, on va évoluer dans la cellulose,  en donnant les caractéristiques mécaniques, ça veut dire la même chose qu’un emballage plastique. Ce que j’ai aimé aussi de ce qu’a dit M. Noel, c’est moins de sortes de plastique, donc moins de sortes d’emballage. Parce que plus il y a de sortes, plus il y a de tri, et plus il y a de tri, plus il y a de rejets. Donc si on revient à la base, et bien moi j’aime ça. Moins il y en a, moins il y a de tri et mieux c’est valorisé, donc si ici, on comprend des choses de base, bien je pense qu’on va faire un grand pas. Puis, recycler le plastique, c’était quand même facile. On ne l’a peut-être pas dit, mais c’est facile. Je prends un contenant, je le dépose dans une machine qui va le fondre et ensuite on refait des palettes de plastique. Donc c’est facile de recycler. Et puis, comme il l’a dit aussi et que j’ai bien aimé, c’est qu’il faut reprendre de bonnes habitudes. On est habitué à jeter, donc il faut changer ces habitudes. Quand on a consommé un aliment,  il faut penser à où l’emballage va après. Puis d’ailleurs, dans tout ce qu’on consomme aujourd’hui, il faudrait qu’on tienne compte de la fin de vie de tous les ustensiles qu’on utilise dans notre vie courante, pas juste les emballages.

 

Yves Noel : Si je peux me permettre, je rajouterais que l’innovation chez Lacroix , je crois que ce qui est important de nommer, c’est comment il expliquait tantôt qu’ils réutilisent, ils granulent leur plastique, leurs rejets de production et ils vont même jusqu’à le trier par couleur pour être capables d’aller justement le remettre dans la même pièce, ou une partie, parce que c’est peut être 5%, 10%, 15% ou 20 % qu’ils peuvent remettre dans certains produits. Alors ça, c’est de l’innovation chez le manufacturier, parce qu’il est en mesure de diminuer ses rejets, et puis de les réutiliser à l’interne. Alors ça ne fait pas un emballage ou un contenant de meilleure qualité, ou d’une grande innovation, mais l’intelligence placée derrière tout ça fait que c’est de l’innovation, pour justement optimiser. En plus, ça leur coûte moins cher, ils font attention à l’environnement, il y a moins de GES parce qu’ils transportent moins de déchets. Tout est électrique aujourd’hui, donc c’est super extraordinaire. Alors vraiment ça, je pense que c’est un côté d’innovation et je peux mentionner que Recyc-Québec a émis depuis quelques années plusieurs programmes d’importance chez des centres de tri des manufacturiers pour pouvoir se procurer de nouveaux équipements et d’améliorer leurs innovations de la valorisation au sein même de leur entreprise.

 

Carmen-G. Sanchez : Justement, quand il est question d’innovation ou d’intégrer, le nerf de la guerre c’est souvent la commercialisation, d’amener justement ce nouveau produit vers le marché. Je serais curieuse de savoir, M. Bouveret, comment vos clients réagissent à ce virage que vous entreprenez dans vos emballages?

 

Nicolas Bouveret : Donc, ils sont tous excités de voir ces nouveaux nouveaux types d’emballage. Par contre, tu vois la première question c’est combien ça coûte? Le problème commence, puisqu’aujourd’hui le fait qu’il y ait peu de matériel qui soit disponible, le fait de la complexité et que c’est encore dans des phases de développement, ça coûte relativement cher. Donc là, déjà en partant, c’est un frein puisque comme vous le savez, dans l’emballage les marges sont quand même relativement faibles. Un pot de yogourt, avec l’emballage, coûte 1 $, donc ça ne laisse pas beaucoup de marge de manœuvre pour les fabricants. Cela étant dit, il faut pour certains changer la catégorie de produits. Par exemple, dans des produits biologiques, comme un yogourt biologique, bien notre client est prêt à payer un petit peu plus pour avoir un emballage qui se démarque, et puis aussi pour attirer le consommateur. Parce qu’au final c’est ça, c’est de vendre son nouveau produit biologique, mais aussi un emballage qui est recyclable, qui n’utilise plus de pétrole, mais qui utilise des végétaux, comme la fibre végétale, pour ses emballages.

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