Nicolas Bouveret : Aujourd’hui, il n’existe pas, on n’a pas de solutions ou on peut réduire par exemple, on a dit de 80 %, soit de diviser par huit la quantité de plastique qu’on utilise pour les emballages alimentaires. Donc en soi, l’innovation est là. C’est de réduire, d’être moins dépendant des énergies fossiles parce qu’on est quand même rendu là aussi. Donc, c’est réduire cette consommation de pétrole et puis aller vers des sources plus naturelles. Parce qu’on a parlé des arbres, parce qu’on est au Québec, mais on a plusieurs usines aussi dans le monde et probablement que nous utilisons des fibres différentes. Par exemple, en Amérique du Sud, on va plutôt utiliser des fibres de canne à sucre. Au Québec, c’est sûr qu’on a des arbres à profusion, donc il faut aller chercher les bonnes essences pour avoir les bonnes caractéristiques mécaniques. Et puis, dans d’autres pays, ce sera d’autres choses. On parle aussi d’être capable de récupérer, par exemple, les cotons de maïs pour utiliser la fibre du maïs, pour être capable de faire des emballages. Peut-être aussi que l’avenir ou le futur, c’est d’utiliser une quantité de fibres recyclées quand celles-ci seront de meilleure qualité. J’espère qu’un jour on sera capable aussi de faire des emballages alimentaires avec de la fibre recyclée.
Carmen-G. Sanchez : C’est une belle vision que vous proposez là, M. Noel. Justement, on en a parlé plus tôt, que vous sentez un certain virage au niveau de l’économie circulaire, au niveau des pratiques. Si je vous retourne la question, innover en matière d’emballage, ça veut dire quoi?
Yves Noel : Je pense que ça serait de limiter les types de produits plastiques. Par exemple, d’en avoir moins parce qu’il y a beaucoup de familles de plastiques. Comme m. Bouveret l’expliquait, la congélation, le froid, la température de la pièce, etc., les gens ne connaissent pas ça. Le plastique, c’est une chimie. Alors si on avait — et l’exemple d’éliminer le PS, le #6 et le #3 dans la collecte sélective — donc moins de produits fabriqués à partir de ça pour le consommateur, je pense qu’on est déjà un pas en avant parce qu’il va y avoir moins de contaminations, moins de plastiques orphelins. Ceci dit, vas avertir ton client chinois qui vend des pinces à grande quantité, que tu achètes et que tu arrives chez vous, tu essaies d’enlever tes pinces de son emballage, puis tu te coupes quasiment le doigt à cause du plastique, et bien c’est du PVC, c’est bleuté un peu. Donc, il va falloir que ça aille jusqu’à celui qui décide, celui qui achète le produit, ou celui qui donne le devis, qui doit dire qu’il faut que ça soit un emballage de telle sorte. Alors ça va loin, et est-ce que les manufacturiers sont prêts à se rendre là?
C’est beaucoup d’investissement. M. Bouveret l’explique, depuis les années 40, ils ont fait énormément d’investissements pour développer de nouvelles choses. Le citoyen était habitué à fonctionner en consommant ; à prendre, puis à jeter. Et là, on est du côté où ce qu’au niveau de l’innovation, on doit être intelligent avec ce qu’on fait avec les matières. Donc, il y a au côté chimique, un côté d’inversion pour les plastiques où ce que la pyrolyse, par exemple, c’est de prendre des plastiques orphelins — divers types de plastiques — afin de les mettre dans un réservoir, puis de fermer ça sous vide et de monter la chaleur à 300 degrés afin de transformer ça en vapeur. Les vapeurs sont ensuite aspirées, et ça devient des huiles pyrolytiques, comme du diesel pour les bateaux et pour différentes utilisations commerciales. Cette innovation-là, qui n’est pas tant une innovation parce que la pyrolyse date d’il y a longtemps, mais de l’appliquer dans le plastique fait qu’il y aura moins plastique, va s’en aller à l’enfouissement. Il faut y aller petit pas par petit pas, et ce n’est pas la solution idéale, mais le temps que ça va arriver au Québec — j’espère d’ici deux ou trois ans — à ce moment-là, ça va déjà être une solution qui va beaucoup aider. En contrepartie, des entreprises comme Lacroix vont développer encore plus leur cellulose. Sachez que quand vous achetez votre sac de patates, à l’intérieur il y a comme une cire, ou une couche plastifiante, qu’on appelle un wet string, et qui repousse l’eau le plus possible. Il y a dix ans, les papetières ne pouvaient pas accepter ce type de produit là pour le recycler, le mettre dans leur pâte à papier. Aujourd’hui, c’est possible. Il y a donc des petites avancées, tranquillement, pas vite, qui font qu’on évolue et que ça avance. Maintenant, c’est qu’il faut y aller petit pas, par petit pas. Si on parle des centres de tri, bien avec la nouvelle responsabilité élargie des producteurs, eux ils vont avoir à débourser un montant d’argent qui va justifier l’opération des centres de tri, alors ce sont eux qui vont devenir responsables. Probablement que ça va les amener encore plus loin dans leur démarche, parce que là, ils vont être responsables, puis ils vont payer. Ils vont probablement faire payer le consommateur… Je ne le dis pas, je l’entends, mais ceci dit, c’est une espèce de mélange d’essais, d’erreurs, d’innovation et d’amélioration. Puis, de rester focus sur nous, sur notre économie circulaire locale, sur notre développement local. Parce que d’acheter de l’extérieur, c’est une chose, mais on ne connaît pas la qualité des matières premières qui arrivent ici.
Moi, c’est tellement drôle, je vous fais un petit aparté. Au Super Bowl, on se retrouve avec des amis et on apporte chacun notre nourriture. J’enlève le couvercle des crudités, et sur le dessus il est écrit PET #1. Alors, je regarde le nom de la compagnie, et c’est drôle parce que moi, je récupère du PET dans des usines manufacturières ici au Québec et j’envoie ça à cette usine là. Et là, je suis chez des amis, j’ouvre le produit, je regarde, et je vois le nom, alors je dis : « Ah ben, il y a un peu de mon plastique et de mon économie circulaire là-dedans. » C’est comme spécial de voir que ce qu’on fait, ça revient. Donc aujourd’hui, quand vous achetez une pelle, quand vous achetez un grattoir, sachez que certains grattoirs pour les automobiles contiennent des Lego. Alors quand on commence à comprendre toute cette mécanique-là — et il y a aussi peut être des pots de M. Bouveret dans des pelles, des produits en polypropylène, il y en a plusieurs, alors on en retrouve — alors quand on prend conscience de ça, peut-être que pour les citoyens, ça nous amène à être plus conscients. C’est la conscience et l’éveil qui vont nous amener plus loin.